Maya est une chaudasse
Aujourd'hui, dans la série "La vie des animaux est tout bonnement fascinante, mais si, vous allez voir", je voulais vous parler d'un petit truc que, comme bien souvent, j'ai entendu en cours, et que je me suis alors empressé de noter dans une marge au crayon à papier, comme toute bonne anecdote qui se respecte.
Le cours en question portait sur l'adaptation des insectes au froid, sujet passionnant s'il en est. Non parce que là je vous vois lever les yeux au ciel, en vous disant que si vous voulez tout connaître de la vie des insectes vous n'avez qu'à regarder La Cinquième. N'empêche que c'est dans ce même cours que j'ai appris l'existence de ce phénomène quand même classe qu'est la surfusion, ainsi que celle d'une bestiole incroyable dont je vous parlerai bientôt ('tain le super teaser !).
Bref, je me suis un peu documenté sur l'anecdote en question, histoire de vérifier que mon prof ne m'avait pas raconté n'importe quoi, quand même (si ça c'est pas du journalisme d'investigation), et voilà ce qu'il en ressort.
Je vous présente un monstre de la nature, un mastodonte des airs, un super-prédateur : Vespa mandarinia japonica, autrement appelé Frelon géant d'Asie (et "Frelon tueur de yak" ou encore "Abeille tigre" par les locaux). Essentiellement présent dans les montagnes japonaises, mais aussi dans toute l'Asie orientale, le bestiau peut mesurer jusqu'à 4,5 centimètres de long (voire 5,5 chez les reines) et 7,6 cm d'envergure. Son venin est parmi les plus toxiques existant dans la famille des insectes volants qui piquent, et 40 personnes meurent par an de piqûres de ces frelons géants, surtout à cause de réactions allergiques.
Le frelon géant d'Asie, en train de siroter un Coca avec une paille
Le frelon géant d'Asie pique avec son dard, réutilisable à volonté (il n'a pas de crochets inversés et donc n'est pas arraché à la première piqûre), mais il se bat aussi avec ses mandibules, qui, comme vous pouvez le constater sur la photo, sont assez impressionnantes. Il chasse d'autres insectes, comme les abeilles, les mantes religieuses, ou d'autres espèces de frelons.
Il affectionne particulièrement les abeilles qui font du miel (et leurs larves, qui représentent des petites gourmandises), et lance des raids sur les ruches des pauvres petites abeilles qui sont sans défense face à des assaillants de cette taille. Lors de ces attaques, un frelon géant peut tuer jusqu'à 40 abeilles par minute (!), et quelques frelons peuvent ainsi décimer en quelques heures les 30 000 habitants d'une ruche moyenne, laissant des petits bouts d'abeille un peu partout. Ils récupèrent alors les larves et les ramènent chez eux pour les donner à manger à leurs propres larves. Que la Nature est cruelle.
Mais là où ça devient intéressant, c'est qu'une certaine population d'abeilles, au Japon (Apis cerana japonica), a trouvé une méthode de défense originale, mais efficace.
Quand les abeilles sentent arriver un ou plusieurs frelons, grâce aux phéromones dégagées, une centaine d'entre elles vont à l'entrée de la ruche et garantissent que celle-ci reste ouverte pour que le frelon puisse rentrer dedans. Le frelon, qui ne se doute de rien (limite il serait en train de siffloter), rentre alors dans la ruche, déjà en train de saliver à l'idée des belles larves qu'il va pouvoir trouver. Mais dès qu'il est rentré, c'est plusieurs centaines d'abeilles qui se jettent sur lui et l'entourent complètement, l'empêchant de bouger. Sur la photo qui suit, deux frelons ont ainsi été emprisonnés par les abeilles qui veillaient.
Au début, les chercheurs croyaient que les abeilles criblaient alors le frelon de piqûres jusqu'à ce qu'il meure. Mais il n'en est rien, c'est beaucoup plus subtil que ça. En fait, les abeilles ont un métabolisme qui font qu'elles tolèrent les hautes températures. Le frelon géant, en revanche, ne survit pas à des températures supérieures à 45°C. Après s'être jetées sur le frelon, les abeilles activent donc toutes très vite les muscles de leurs ailes en les faisant vibrer, non pas pour s'envoler, mais pour faire monter la température à l'intérieur de la "boule d'abeilles". Quand vous courez, ou que vous faites un exercice quelconque, vous avez chaud, c'est parce qu'un muscle en activité dégage de la chaleur, tout simplement. Les abeilles se servent de ça pour faire monter la température à 47°C. Elles survivent, mais le frelon à l'intérieur est cuit vivant et meurt. Bien sûr, le frelon se défend un minimum et certaines abeilles meurent aussi. Mais ces vaillantes combattantes tombées au champ d'honneur se seront sacrifiées pour le bien de la colonie (snifff...).
Voilà, c'est tout. Je sais pas vous, mais moi, cette histoire d'abeilles qui se débarassent d'un prédateur en le faisant mourir de chaud, je trouve ça... classe. La Nature trouve toujours une voie, aussi étrange soit-elle... ^^